Eolien-Aquitaine

Antoine WAECHTER et les éoliennes


Antoine WAECHTER Antoine Waechter
11.12.2008


POURQUOI S'OPPOSER A LA MULTIPLICATION DES EOLIENNES INDUSTRIELLES ?



L'impact paysager des aérogénérateurs

Les quelques éoliennes plantées dans la zone portuaire de Fos ou de Dunkerque ne sont pas choquantes. Elles sont dans le paysage industriel qui leur convient et elles font 25 mètres de haut plus 15 mètres de pales.

Les éoliennes continentales font 120 mètres de haut plus 30 mètres de pales ! Tous les objets, maisons, églises, forêts…, placés dans le même champ de vision qu'elles, sont écrasés par cette hauteur et réduits à un décor de lilliputiens. Elles sont trois à cinq fois plus hautes que tout autre élément naturel ou construit du paysage rural : 10 mètres pour une maison au faîte du toit, 35 à 50 mètres pour le plus grand des sapins, 55 mètres pour le plus grand des pylônes d'une ligne à très haute tension et 150 mètres pour un aérogénérateur à la pale dressée. Dans une vaste plaine sans haie, tout objet vertical est pris comme point focal par l'œil. Cet objet, arbre, clocher, pylône, château d'eau, détermine l'ambiance du lieu et l'œil ne peut s'en détacher sans y revenir constamment.

Dans les paysages de qualité, ces objets sont valorisés par le relief et la végétation. Le relief et la végétation atténuent aussi l'impact des objets incongrus. Mais rien ne peut atténuer la hauteur d'une girouette blanche qui dépasse la cime des arbres de plus 90 mètres. Les aérogénérateurs imposent leur empreinte dans des paysages naturels et ruraux. Transformer le Mézenc, le plateau du Cantal et la crête des Vosges en zone industrielle dédiée au vent est contresens et un crime contre la beauté.

Lorsque deux points focaux (et a fortiori un hérisson de points focaux) se disputent l'attention de l'observateur, l'œil de ce dernier passe inconsciemment de l'un à l'autre. La perception est déstabilisée, un malaise s'installe : le cerveau répond en cessant de percevoir. Les champs d'éoliennes absorbent le paysage, le neutralisent.

En envahissant les espaces naturels, les aérogénérateurs transgressent la limite fragile qui sépare l'espace humanisé du territoire de la nature. Ce territoire où l'humain se retrouve face à ce qui n'est pas de lui est nécessaire à l'équilibre de l'homme moderne. Agissant comme un drogué capable de tout pour obtenir de la drogue, la société industrielle se montre prête, pour satisfaire sa faim d'énergie, à sacrifier ce que, hier encore, elle convenait de protéger. A la différence des pylônes d'EDF que nous combattons depuis 35 ans, les aérogénérateurs sont blancs pour être visibles de jour et équipées de clignotants pour être repérés la nuit. Et leur extrémité s'agite pour ne jamais se faire oublier du promeneur.

Les autres impacts

Les nouvelles éoliennes ne produisent plus de bruit métallique, mais certains riverains subissent encore le cliquetis des anciennes. Par contre, le brassage de l'air par des pales trois fois plus longues que la façade d'un pavillon crée une ambiance sonore puissante et angoissante. A 200 mètres sous la machine, le bruit n'est plus perceptible, mais il peut l'être à 500 mètres par un riverain placé sous le vent.

Personne ne résiste longtemps au passage toutes les trois secondes de l'ombre portée de la pale sur sa maison. C'est pourquoi, dans certains pays, il est interdit de planter un aérogénérateur à moins de 1500, voire de 2000 mètres, d'une habitation.

Selon l'Office national de la chasse et de la faune sauvage, 0,4 et 1,3 oiseaux par éolienne sont tués chaque année. Les naturalistes font aussi état d'incidences sur les chauves-souris et sur les migrations.

La perversion du système de financement

En imposant à EDF une reprise du courant produit à un tarif fortement dopé, financé par un impôt à la charge de tous les consommateurs d'électricité (voyez votre facture à la rubrique "contribution au service public de l'électricité"), le gouvernement a créé une mine d'or. En pleine crise financière, les seules actions cotées en bourse qui se maintiennent sont celles des entreprises de l'éolien. L'investissement est important, le rendement est assuré. Les communes touchent des taxes professionnelles et les propriétaires des terrains perçoivent un loyer.

Des chasseurs de sites sont à l'oeuvre : leur job est de dénicher des élus favorables pour le compte des multinationales de l'environnement. Ces entreprises ont créé leur groupe de pression : France énergie éolienne (FEE), Syndicat des énergies renouvelables (SER). Leur motivation n'est pas de produire de l'énergie, mais de l'argent. Paysages emblématiques, édifices classés, milieux naturels (le projet du Bonhomme est en plein dans l'un des deux derniers sites du Grand Tétras des Vosges) … peu importe, dès lors que des élus se sont laissés convaincre.

Le plus extraordinaire est de trouver des écologistes, le plus souvent de Gauche, parmi ces agents du capitalisme financier.

La conséquence la plus visible de la perversité de ce système réside dans l'incapacité des pouvoirs publics à dicter une politique régulée du développement éolien et surtout dans la hauteur des mâts : plus une éolienne est haute, plus elle produira de l'argent (rappelons que l'aérogénérateur fonctionne pour des vents supérieurs à 20 km/h et que les pales se mettent en drapeau lorsque la ventilation est supérieure à 80 km/h). La carte du gisement éolien indique un rendement très faible pour la moitié Est du pays : cette faiblesse est compensée par des hauteurs quatre fois supérieure à celles des éoliennes installées sur le littoral ou dans la vallée du Rhône.

Les éoliennes ne remplaceront aucune centrale nucléaire

Le vent est aléatoire, imprévisible. Pour compenser cet aléas, il est nécessaire de disposer d'une production immédiatement mobilisable : seules les centrales thermiques au gaz ou au charbon peuvent répondre à cette exigence. Il ne s'agit pas seulement de sécuriser la fourniture d'électricité au client, mais aussi, et surtout, d'éviter l'effondrement du système à la suite d'une chute brutale de tension. Pour 100 d'éolien, il faut 60 de thermique fossile. En d'autres termes, les éoliennes ne remplaceront pas le nucléaire. Nous massacrons le visage de la France sans aucun effet sur le parc électronucléaire français. Malgré un énorme développement de l'éolien, la production d'électricité d'origine thermique a continué à croître en Allemagne.

Les éoliennes ont peu d'efficacité dans la lutte contre l'effet de serre

Conséquence directe du constat précédent, le développement de l'éolien s'accompagne du développement du thermique fossile. Le propos doit cependant être nuancé. Une structure énergétique fondée sur des centrales au charbon, comme en Allemagne, peut être modulée par l'introduction d'énergies aléatoires. La production éolienne française, non compensable par le nucléaire dominant, est injectée dans le réseau et alimente l'interconnexion européenne. Les pertes du réseau représentent 15 % de la production totale d'électricité, c'est-à-dire davantage que ce que les partisans de l'éolien espèrent produire en 2020. Dans les conditions actuelles de développement de l'éolien en France, les désavantages l'emportent largement sur les avantages.

La perversion du développement durable

Que ce soit dans le domaine de la production d'énergie ou dans le domaine de l'architecture, la notion de développement durable est pervertie par une approche à objectif unique, l'énergie. Une approche écologique prend nécessairement en compte la totalité des facteurs, notamment le paysage, la diversité vivante, le respect des populations locales.

De plus, je ne conçois pas un développement soutenable qui ne soit pas démocratique, c'est-à-dire placé sous le contrôle souverain du peuple. Le mépris et l'agressivité que des élus se réclamant de l'écologie manifestent à l'égard de la population qui s'oppose aux éoliennes, leur refus d'arbitrer le différend par une consultation référendaire, voire de prendre en compte celles qui ont été organisées par des communes voisines, est significatif.

Les partisans de l'éolien rejoignent par leur dialectique d'exclusion la grande corporation des promoteurs de tous poils (nucléaire, autoroute, grande promotion immobilière …) : les opposants à l'éolien sont des partisans du nucléaire ; d'ailleurs, vous voyez bien, Giscard d'Estaing manifeste avec eux... En d'autres termes, inutile de discuter leurs arguments.

Les énergies renouvelables peuvent être des énergies dures

Au-delà d'un certain niveau de mise en œuvre, les énergies renouvelables deviennent des énergies dures : ainsi, le développement excessif de l'énergie bois peut réduire nos forêts à l'état de taillis coupés ras tous les 12 ou 18 ans comme ce fut le cas encore au milieu du siècle passé dans une partie de la France ; la multiplication des turbines sur les cours d'eau peut conduire à une artificialisation de notre réseau hydrographique comme les barrages hydroélectriques ont tué le Rhin et le Rhône ; la multiplication des éoliennes a les effets décrits plus haut… Tout développement doit être soumis au contrôle de l'ensemble des facteurs. Le caractère renouvelable ne doit pas conduire à faire l'économie d'une analyse critique du recours aux énergies dites alternatives.

Ne pas mentir aux gens

Au-delà des intérêts financiers qui mobilisent les investisseurs et certains de leur soutien (y compris, malheureusement, certains de nos anciens collègues), les motivations des partisans de l'éolien peuvent aussi être d'ordre psychologique. Il est, en effet, pour une fois, agréable d'être du côté des promoteurs, de pouvoir être "positifs". Et puis, le discours antinucléaire est d'autant plus facile à délivrer qu'il est possible de laisser croire que l'atome et le charbon pourront être remplacés par les énergies renouvelables sans remise en cause de notre confort. La crise énergétique ne se dénouera pas sans une réduction drastique de nos besoins en énergie. Cette réalité doit être dite à nos concitoyens.

Faut-il jeter le vent aux orties ?

Les énergies renouvelables ont leur place dans le cocktail de réponses que nous avons à mettre en œuvre. Le bois, sous réserve de bien encadrer son exploitation, la géothermie profonde et le solaire, en plus de l'hydroélectricité déjà installée, sont les sources les plus importantes.

Mais, ce développement doit répondre à quelques règles élémentaires :

· il doit être décentralisé, les consommateurs étant, autant que possible, les investisseurs ; injectée dans le réseau national, l'énergie du vent n'a aucun effet subversif ; elle couvre une partie des pertes et disparaît dans le tonneau des Danaïdes de la croissance ; les énergies domestiques (isolation thermique, bois, solaire), au contraire, permettent à chacun de se désolidariser de la logique de croissance ;

· il doit être sincère : il s'agit de produire de l'énergie sans esprit de gain financier ; je propose de supprimer l'obligation faite au distributeur de payer le kW/h produit à un tarif dopé et d'exonérer les installations de taxe professionnelle ; il appartient à l'Etat et aux collectivités de subventionner des projets cohérents, adaptés aux besoins locaux ; en l'absence de manne financière, les projets seront nécessairement pensés en fonction des besoins locaux dans un objectif de déconnexion des énergies fossiles au coût croissant.

Ces deux caractères réunis conduiront à imaginer des projets plus petits, moins impactant pour la population et le paysage, sans doute à abandonner les éoliennes dans la partie continentale du pays où les rendements sont très faibles. Débarrassées de la motivation d'aubaine, les communes construiront de véritables plans énergétiques, associant les économies d'énergie et les sources les plus pertinentes localement.

Précision ultime : cette analyse ne concerne que l'éolien industriel, pas l'éolien domestique.

Antoine WAECHTER 11.12.2008


JP
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Jacky Paillé

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